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#poésie

14 juillet 2016 19 h 51 min
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Beat Generation : l’exposition confuse

Au Centre Pompidou jusqu’au 3 octobre

Affiche sur la façade de BeaubourgEntrée de l'expo Beat Generation

Les commissaires de l’exposition ont dû se dire, en la concevant, que ce serait compliqué d’habiller l’espace énorme des expositions temporaires – Galerie 1, 6ème étage, si tu as le vertige, prépare-toi à remonter la coursive les yeux fermés – en montrant seulement des écrivains et des poètes. Alors ils ont eu l’idée « géniale » de replacer « le mouvement beat dans un horizon élargi », comme le dit la brochure. Et vas-y bien, mettons des photos de la série Les Américains de Robert Franck puisqu’on montre – et à juste titre – son film new yorkais Pull my Daisy dans lequel on voit Allen Ginsberg, William Burroughs, Gregory Corso, etc. et que c’est Jack Kerouac qui lit en voix off le poème écrit pour l’occasion. Ce film est montré à droite de l’entrée, c’est par là que ça commence, moi j’ai été victime des clichés et j’ai cru que le film était à la fin et je suis partie vers la gauche ! Mais des films, il y en a plein, d’abord la route sur trois grands écrans dès qu’on entre, car c’est quand même Kerouac qui domine tout… Ben oui, y a son tapuscrit du roman, le fameux rouleau de 36 mètres déroulé sous vitrine qui traverse toute la salle :

Tapuscrit de Sur la route

 

Et si tu pars à droite dans l’expo, tu vois la machine à écrire de Kerouac ! Objet culte s’il en fut :

 

 

 

 

 

Machine à écrire de Jack Kerouac

Avec ce roman, paru seulement en 1959, soit 8 ans après avoir été écrit, Kerouac impulse un nouveau style, qui sera qualifié de « beat » par les journalistes. Mais pour lui, il s’agit de prose spontanée, et il décrira précisément ce qu’il entend par là : noter dans des carnets tout ce que l’on voit, ce que l’on entend dans la rue, les bars, autour de soi, noter aussi nos propres impressions là où nous nous trouvons, puis restituer le tout dans une écriture rapide, naturelle, rythmée (l’un des sens du mot « beat ») sans se relire, sans ponctuer, sans s’arrêter. D’où ce rouleau de papier calque rapporté par un ami travaillant dans une imprimerie : ce n’est pas concevable de perdre du temps en changeant de feuille pendant la frappe. Il faut tout dire, on peut tout dire, ça préfigure presque ce flow des MCs du rap… Dans l’exposition, on voit aussi ses peintures et dessins sur tout un mur :

Peintures de Kerouac

Curieusement, on sent l’influence des surréalistes, de Dada, de l’expressionnisme, voire du Bauhaus, tous ces mouvements d’avant-guerre qui étaient encore très proches des années 45-50 quand ces poètes, photographes et peintres ont commencé à créer, jeunes artistes américains tournés vers l’Europe. L’Amérique n’avait-elle pas hébergé tous ces Européens menacés par le nazisme pour leurs oeuvres dégénérées ou simplement leurs origines ?

Outre cette réforme stylistique profonde à rebours de la poésie anglaise extrêmement codifiée – semblable à la révolution du vers libre contre l’alexandrin chez nous, les poètes et écrivains beats expriment une révolte contre la société de consommation américaine, l’idéologie dominante du dollar tout-puissant, de l’opulence matérielle et contre l’appauvrissement spirituel et intellectuel de cet après-guerre où les Etats-Unis ont sauvé le monde de la barbarie fasciste, mais doivent aussi résister au communisme en montrant combien le capitalisme est un meilleur système pour rendre les gens heureux dans une démocratie libre. Ainsi, le très célèbre poème de Ginsberg Howl, crie sa révolte et dénonce tout ce système. D’abord censuré, il paraîtra ensuite chez City Lights Books dans la série Pocket Poets de Lawrence Ferlinghetti, lui-même poète de ce mouvement. On peut l’entendre le dire au casque dans l’exposition  – cherchez bien, c’est dans un coin, hélas, et le manuscrit se trouve totalement ailleurs :

Manuscrit de Howl d'Allen Ginsberg

Il y a beaucoup de photos de Ginsberg, avec Peter Orlovsky, Gregory Corso, William Burroughs, à New York, ville qui constitue l’un des axes de l’expo, les deux autres étant San Francisco et Paris. En guest star, pourrait-on dire, le Mexique et Tanger. Et puisqu’on parle de Mexique, pourquoi ne pas mettre des photos et des films d’artistes des années 60 qui n’ont rien à voir avec le mouvement beat ? Et pour Tanger, pourquoi ne pas mettre un film sur Paul Bowles, qui n’a rien à voir ici ?!

Je n’ai pas compris toutes ces photos et ces peintures, même si ça m’a fait plaisir de voir une photo de Henry Miller à Pacific Palisades… Bien sûr, il y a des poèmes de Michael McClure, Philip Lamantia, une oeuvre de Kenneth Patchen sur un petit carton d’origine tout jauni, c’est émouvant mais je n’ai pas sorti mes lunettes… Et on voit aussi Kenneth Rexroth, qui pour moi a précédé les poètes beats et vivait déjà dans sa tour isolée après la guerre, donc ne devrait pas être ici. Du coup, pourquoi ne pas avoir montré des oeuvres de William Carlos Williams, voire Ezra Pound ? Il y a la vidéo de Dylan où l’on voit Ginsberg en arrière-plan, car Bob Dylan est l’un des héritiers du mouvement et cette exposition va jusqu’aux années 70.

En fin de compte, je me demande si tout n’est pas centré sur Kerouac, dont quelques vêtements ont été rassemblés dans une vitrine, c’est très émouvant,, et dont une grande citation orne un mur (outre le fameux Everything belongs to me because I am poor) :

Vêtements de KerouacPoème de Jack Kerouac

Tout ce mélange de photos, textes sur d’immenses kakemonos en anglais, vidéos, interviews au son pourri où l’on peine à entendre quelque chose, films sur écrans géants avec sous-titres énormes finit par nous saouler au lieu de nous expliquer les choses. Et, comme pour l’expo sur Guy Debord et le situationnisme à la BNF où l’on ne situait rien (oui bon, le jeu de mots est nul mais je n’ai pas résisté), si je ne m’étais pas spécialisée sur la Beat Generation pendant mes études universitaires, je serais ressortie en ne comprenant toujours pas de quoi il s’agit. En plus, mon chouchou, Gary Snyder, est à peine représenté sauf sur quelques photos, dont celle-ci, pendant son séjour au Japon, prise par Ginsberg en 63 et que je n’avais jamais vue, elle m’a émue.

Gary Snyder, 1963

 

 

 

Mais aucun poème !!! Il va donc falloir que j’écrive un article pour vous le présenter.

 

 

 

Donc je ne sais trop quoi vous conseiller… Documentez-vous avant d’y aller et vous serez émus par les manuscrits originaux et tous ces poèmes (bon, il faut comprendre l’anglais) et ces photos, ou… allez-y avec moi et je vous explique ?!

Category: Actualité culturelle
Tags: Amérique, après-guerre, Beat Generation, Gregory Corso, Jack Kerouac, photos, poésie, William Burroughs
21 septembre 2015 19 h 38 min
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Franck O’Hara, poète

Un New-Yorkais qui swingue

Membre de ce que l’on a appelé la New York School, Franck O’Hara (1926-1966) écrit la ville, décrit ses scènes sur le vif, restitue son rythme trépidant avec joie, humour et un grand talent pour associer des images de façon inhabituelle. Décédé à la suite de ses blessures, écrasé par une voiture de nuit sur une plage de Fire Island, il reste dans l’histoire de la littérature américaine comme un poète sympa et chaleureux pour qui la poésie est le travail d’un instant. Il écrivait au milieu de la foule, au cours d’un vernissage (il était l’un des conservateurs du MOMA à New York), dans son bureau ou pendant sa pause déjeuner, d’où sa collection de poèmes la plus célèbre, Poèmes déjeuner où figurent des textes écrits entre 1953 et 1964, récemment rééditée par City Lights Books – c’est le numéro 19 de la collection The Pocket Poets Series – à San Francisco, qui fêtait récemment ses 60 ans (voir mon article sur le sujet) :

Lunch Poems F O'Hara

 

 

 

Et en français aux Editions Joca Seria, traduit par Olivier Brossard et Ron Padgett:

 

 

 

poèmes déjeuner

 

 

Il boit un verre de jus de papaye et retourne au boulot, des poèmes de Pierre Reverdy dans la poche, après une promenade il revient sur ses pas, achète des cigarettes et tombe sur la photo de Billie Holiday dans le New York Times, la chanteuse vient de mourir, il en est bouleversé, il apprend que Lana Turner s’est évanouie, il remonte Park Lane, c’est l’automne, une autre fois il grêle, Madison Avenue, nous sommes en avril, non, mai, Manhattan, une soupe et on repart bosser, le Seagram Building, la ville bouge tout autour, rencontre avec Kenneth Koch (poète de la même école), du poisson avec l’ami LeRoi Jones, Williamsburg Bridge, 16 cents et des yaourts pour seul déjeuner tel autre jour… On pense au jazz, autre écriture syncopée. Toujours personnels, les poèmes évoquent des souvenirs de voyage, des lectures – O’Hara aimait Rimbaud, Mallarmé, Maïakovski à qui il a dédié un poème (lu par Don Draper dans la série Mad Men, c’est dire si c’est culte !), de la musique car il jouait du piano et pouvait soudain dans un salon surprendre par du Rachmaninov chez quelqu’un qui ignorait ce talent…

Egalement traduit en français par les mêmes et publié chez le même éditeur, Méditations dans l’urgence où figure ce fameux poème lu par Don Draper et dont l’épisode de Mad Men porte le titre, du coup, nous fait découvrir un style qu’O’Hara a nommé le « Personnisme ». Il s’agit de parler de soi, de ce que l’on aime, mais non pas pour soi : le poète s’adresse à un autre que lui-même pour lui raconter la vie dans son immédiateté. Influencé par l’expressionnisme abstrait, le surréalisme et l’action painting, il écrit comme on note une nouvelle entrée dans son journal intime.

Je le lis en anglais, aussi je peux vous recommander son site officiel et l’anthologie de poètes new yorkais, car John Ashbery, Kenneth Koch et James Schuyler sont tout aussi passionnants :

The New York Poets an anthology

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour la VF, le site de l’éditeur Joca Seria et ce 2ème livre :

Méditations dans l'urgence F. O'Hara

 

 

 

 

 

 

 

Bonne lecture, bon voyage dans le New York des années 50 et 60, toute une époque !

Category: Littérature
Tags: déjeuner, Franck O'Hara, Manhattan, New York, New York School, poésie
28 juillet 2015 22 h 26 min
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Kalevala, Pentti Holappa, chants ouraliens

Quel rapport ? Tous traduits par Gabriel Rebourcet !

J’ai rencontré ce génie dans la belle ville d’Arles, où les langues finno-ougriennes étaient à l’honneur aux rencontres annuelles de traducteurs. Pendant deux jours et demi en effet, les traducteurs se rencontrent en Arles, à la Toussaint, pour des tables rondes, des ateliers, des conférences et bien sûr, des déjeuners et des dîners. Cette année-là, nous fêtions les 10 ans de ces rencontres avec l’Association des Traducteurs Littéraires de France. Au dîner de fête, je me suis retrouvée avec les traducteurs d’estonien et de finnois, moi qui étais traductrice de littérature hongroise. Gabriel venait de traduire le Kalevala, l’épopée des Finlandais, qu’Elias Lönnrot avait compilée dans les campagnes.

photo 1 (26)

Voici encore le cas d’une épopée transmise oralement de générations en générations et finalement figée dans la forme que nous connaissons actuellement depuis 1835. Jusqu’à la remarquable traduction de Gabriel Rebourcet, très audacieuse car respectueuse des rythmes de l’épopée et du lexique ancien, voire archaïque, nous avions la traduction un peu ardue de Jean-Louis Perret de 1927.

Ingénieur que rien ne destinait à cette carrière de « passeur de mots », Gabriel Rebourcet part travailler en Finlande, apprend le finnois et se passionne pour la littérature de ce pays. Il découvre les langues finno-ougriennes en même temps. Sa passion emporte tout sur son passage, et il dévoue tout son temps libre à la traduction du Kalevala parue en 1991 chez Gallimard, dans la collection « L’aube des peuples ». Que nous en dit-il ?
La voix des hommes épouse le tragique, le lyrique et le magique : denses récits, profusion de mots, puissance du mal, beauté des voix, le Kalevala révèle la genèse et le génie de l’homme dans le monde.
Lisez, lisez à voix haute : voici l’oeuvre immense d’un petit peuple.

Et en effet, l’histoire du barde Väinämöinen, magicien qui joue d’un instrument traditionnel, le kantele, et qui est lié à la tradition chamanique des peuples du Nord, nous entraîne dans des contrées peu familières. Le forgeron Ilmarinen occupe une place importante dans cette épopée, or l’on sait que les forgerons, alliant le fer et le feu, frayent avec les dieux… Petit extrait :
« mais où vas-tu, vieux Väinö,
par le large, enfant de la gane ? »

Väinö le vieux lui répond :
« je pars à la traque des oies
la traille des ailes diaprées,
je veux riper les becs baveux
aux goulets profonds du Saxon,
dans la plaine en roulis du large.

Anniki la belle nommée,
la fillette dit ces paroles :

« Je sais quand on me parle franc,
or je flaire un vilain jaseur !
Mon père allait d’autre manière,
naguère, mon parent de sang,
chasser sur les trousses des oies,
pour la traque des becquées rouges : »

Lorsqu’est paru le recueil de Pentti Holappa, en 1997, je n’ai pas été étonnée que ce soit le bouillant Gabriel qui l’ait traduit ! Ce poète finlandais qui écrit depuis 1950 devait figurer dans la collection « Poésie » de Gallimard, car les langues dites minoritaires se doivent d’être respectées et connues du grand public, il n’y a pas de raison à ce que l’on publie en majorité les anglo-saxons ! Merci à Gabriel Rebourcet ! Petit extrait :

Pentti Holappa : Les mots longs
Ainsi donc cependant que je m’avance par la plaine mon moi d’hier sommeille encore sur la paille et s’appuie à ton épaule. Revenu aujourd’hui, j’apprends à souffrir le doute, qui menace de sa destruction.

Je marche dans un paysage symbolique. Je vêts de mots l’angoisse que justifie
l’inévitable fuite et la mort incontournable, or les mots ne devraient pas nous vêtir mais le silence.

 

 

Passé minuit, ce soir-là en Arles, notre exaltation monta d’un cran, nous nous mîmes à parler du folklore finno-ougrien, de mes ancêtres chevauchant à cru les steppes d’Asie centrale, de toute cette tradition poétique si riche mais non traduite, dont il était tellement important de conserver des traces après l’uniformisation soviétique. J’avais appris, peu de temps auparavant, que l’usage des langues parlées parfois par 10 000 locuteurs seulement avait sauté une génération : c’étaient les grands-parents qui apprenaient aux petits-enfants à parler leur langue d’origine – mordve, yakoute, tchérémisse, vogoul, nenets, ostyak, etc. car leurs parents ne parlaient que le russe. Et c’est ainsi que – top là  ! – nous décidâmes de réaliser une anthologie de poésie sibérienne, dans notre état d’ivresse exalté.

Quelques temps après, chez un grand libraire parisien, voici ce que je trouve en rayon :

Chants ouraliens

Alors je me suis exclamée à voix haute : « Il l’a fait ! » et dans ma joie, j’ai acheté le volume. Hongroise d’origine, je suis fière d’appartenir à un peuple frère ou cousin de ces hommes, ouraliens et sibériens, aux traditions poétiques très anciennes. Il y a là des prières, des incantations pour guérir, des chants pour accompagner les noces ou les deuils, des poèmes mythiques et historiques… Tout ce fonds a été recueilli par des ethnologues qui sillonnaient les campagnes à la fin du XIXème siècle, comme le faisaient en Europe les poètes ou « folkloristes » pour préserver une culture menacée de disparition par l’industrialisation, la désertification ou les migrations de paysans vers les villes.

Petit extrait, une incantation mordve pour refermer une plaie :
Près du troupeau, guetteuse blanche,
une fille blanche est assise,
elle porte un corsage blanc,
entre ses mains, sur son giron,
elle coud son ouvrage blanc,
dans la main l’aiguille en métal,
dans le chas un fil de soie rouge.

Cette plaie je la couds, la ferme,
je la resserre cette plaie,
je mets fin au débord de sang,
le sang sur la main de Stiopan,

le sang sèche, le sang s’épuise,
et le tourment tantôt s’efface.

Le traducteur fait réellement oeuvre de « passeur », expliquant, commentant, annotant ces textes qui nous viennent de la nuit des temps. Une bibliographie très complète agrémente cette anthologie, pour ceux qui auraient envie d’explorer plus avant ces contrées littéraires escarpées mais enrichissantes comme des voyages le long de l’Ob ou de la Volga, voire des côtes de la mer Baltique.

Pas convaincus ? Attendez que je vous parle des traditions druidiques !

Category: Littérature
Tags: chamanisme, épopée, Finlande, finno-ougriens, Kalevala, poésie, traduction
26 mai 2014 21 h 12 min
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Patrick Bouvet ou l’écriture qui explose

Une écriture maîtrisée… pas un gimmick !

Depuis 1999 et l’OVNI littéraire In Situ, Patrick Bouvet trace sa route d’écrivain, plasticien et compositeur. Oserai-je dire qu’il utilise à chaque fois la même méthode du sample et du collage ? Oui ! Alors autant son oeuvre de plasticien ou de musicien s’inscrit dans un courant, une technique, un mouvement, autant son écriture le rend à nul autre pareil.

Il en est à son 11ème livre, Carte son, et s’en prend cette fois à la musique, dénonçant à sa façon le star system, comme il a dénoncé tous les travers de notre monde dans les 10 ouvrages précédents : attentat terroriste, cinéma, 11 septembre, marketing, télévision, photo de mode… C’est extraordinaire !

Patrick Bouvet prend nos mots, les secoue, les renverse, les bouleverse, une phrase répétée à l’envi dans les journaux devient l’expression de tous nos maux : il la retourne, l’explose, la déchiquette, la détruit-reconstruit, on ne sait plus où donner de la tête dans ce rythme haletant où l’on est emporté entre surréalisme et déconstruction post-moderne. Les réalités se télescopent, les images se succèdent, se chevauchent, s’emmêlent et donnent naissance à des monstres sous nos yeux effarés, la répétition lancinante des groupes de mots dans des combinaisons à chaque fois différentes pousse le langage dans ses retranchements. Le rythme s’emballe, retombe, repart, on est scotché, déconcerté, surpris, désorienté… Cette écriture heurtée accouche d’une poésie fulgurante dans un cri spontané contre les automatismes de la pensée médiatisée, informatisée, aplatie, dénuée de sens à force de réitération et qui soudain, redonne à chaque mot son sens plein et entier en l’isolant des autres.

Ce style condensé, resserré, minimal est tellement maîtrisé que c’en est d’autant plus percutant. Patrick Bouvet, lui, sait d’où il part et où il va. Un exemple ? Evidemment ! Le début d’In situ pour comprendre très vite :

« le risque zéro
ça n’existe pas »
une femme aurait traversé
les barrages
avec une arme à
feu
dans son sac
des scénarios de
détournement d’avion de
prise d’otages de
gaz toxiques dans le métro
ont été testés
mais
« le risque zéro
ça n’existe pas »
(il y a seulement
huit mille ans
le Sahara était couvert
de lacs et de prairies)
le système
de vidéosurveillance
fonctionne parfaitement
le système fonctionne
mais
une femme
aurait traversé
le Sahara
de la vidéosurveillance
vidéo
zéro
dans son sac
pourtant le système
fonctionne
parfaitement (le tombeau
millénaire d’Hébron est sous
vidéosurveillance)

La plupart de ses livres sont édités chez les Editions de l’Olivier. Il a publié quelques textes directement sur Internet aux Editions Inventaire-Invention et, il y a une quinzaine d’années, alors que je n’avais pas Internet, il m’a envoyé un exemplaire broché du livre avec une dédicace adorable, car en plus il est SYMPA !

Vendredi 23 mai, il était à la Maison de la Poésie à Paris, pour une lecture de Carte son avec une vidéo en musique de son crû, complément magistral de son écriture.

Editions de l’Olivier

Category: Littérature
Tags: écriture, poésie, post-moderne
21 avril 2014 22 h 42 min
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René CHAR

Un immense poète

Né à L’Isle-sur-la-Sorgue dans le Vaucluse en 1907, René Char est mort à Paris en 1988. Colosse d’1,92m au rocailleux accent du Sud, il habite à L’Isle-sur-la-Sorgue une grande partie de sa vie,  et reprend même les plâtrières que dirigeait son père mais, comme par hasard, une septicémie l’empêche de continuer ce travail. Il a fait de fréquents séjours à Paris, et a appartenu un temps au mouvement surréaliste dans les années 30, au moment où d’autres le quittaient. Résistant pendant l’occupation sous le nom de Capitaine Alexandre, il décrit cette expérience dans Les Feuillets d’Hypnos. Mais il écrit surtout une oeuvre poétique très importante et magnifique que je vous invite à découvrir. Ainsi que le dit très justement Maurice Blanchot, dans cette oeuvre « l’expression poétique est la poésie mise en face d’elle-même et rendue visible, dans son essence, à travers les mots qui la recherchent. » Il chante l’amour bien sûr, mais aussi la joie, la confiance, le bonheur de vivre, les paysages qui l’entourent…

Un poème peut s’écrire en deux lignes, tel celui-ci, intitulé Ils sont privilégiés… :

     Ils sont privilégiés, ceux que le soleil et le vent
suffisent à rendre fous, sont suffisants à saccager !

L’un de mes poèmes préférés

Très émouvant, il parle d’une situation que nous avons tous connue : après une séparation, nous continuons à penser à l’être aimé, à le protéger en pensée alors qu’il ne s’en doute pas.

Allégeance

Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il
va dans le temps divisé. Il n’est plus mon amour, chacun peut
lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l’aima ?

Il cherche son pareil dans le voeu des regards. L’espace qu’il
parcourt est ma fidélité. Il dessine l’espoir et léger l’éconduit.
Il est prépondérant sans qu’il y prenne part.

Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu,
ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s’inscrit
son essor, ma liberté le creuse.

Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il
va dans le temps divisé. Il n’est plus mon amour, chacun peut
lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l’aima et l’éclaire
de loin pour qu’il ne tombe pas ?

Category: Littérature
Tags: poésie, René Char, résistant, surréalisme, Vaucluse
Réalisé par Stéphane Roche • http://www.stephane-roche.fr