Yahia lababidi

 

 

Né au Caire il y a un peu plus de quarante ans, Yahia Lababidi vit à Washington. Je ne sais plus par quel biais nous sommes devenus amis sur Facebook, mais je lis ses posts avec délice depuis. Il cite volontiers Rumi, s’intéresse aussi à Confucius et à Nietzsche (entre aphoristes on se comprend). L’Egypte aussi reste présente, mais il a adopté les formes elliptiques de l’anglais de façon remarquable pour continuer une oeuvre commencée il y a plus de vingt ans.

 

Je viens de finir Barely there, un recueil de poèmes où effectivement le poète est à peine présent car en allé dans une quête ontologique, un ailleurs où le silence tient toute sa place, loin de l’agitation stérile du monde extérieur, là où l’on respire un air mystique profondément serein et qui nous interpelle dans notre humanité. Quelques exemples :

A Metaphor

Where ocean and shore greet,
a metaphor,
for where Spirit and body meet.

SPOKESPERSONS 

The privilege
and fiendish challenge
of trying to be
one of Silence’s
trusted spokespersons.

Options

You can’t bury pain
and not expect it
to grow roots.
But you can try
and tend tenderly
to its subtle fruits.

Surrogates

Denied the balancing hand
of sane and loving parents
he ransacked libraries and worlds
emotionally, for a mother
intellectually, a father.

Lovers

What is a mystic
but one who swoons,
defenseless in the face of Beauty.

De nombreuses publications dans des revues littéraires, deux recueils de poèmes, un essai, un recueil d’interviews, un recueil d’aphorismes où Yahia est le seul auteur arabe et, à paraître au printemps 2016, un recueil d’anciens et nouveaux poèmes, Balancing act, new and selected Poems, aux éditions Press 53.

Cette poésie de l’ellipse se retrouve bien évidemment dans ses aphorismes, où Yahia Lababidi traite de l’écriture, mais aussi de spiritualité, de relations humaines, de tout ce qui fait la vie en somme. Après Rabelais, Montaigne, La Rochefoucauld, La Bruyère, Oscar Wilde, Cioran et bien sûr les philosophes comme Wittgenstein, Schelling, Schopenhauer entre autres, cela m’a surprise que mes contemporains apprécient encore ce genre d’écriture. De quoi s’agit-il ? Le Larousse nous dit que c’est le résumé d’une vérité fondamentale, l’énoncé succinct d’une vérité banale. Ailleurs on lit que c’est « une proposition résumant l’essentiel d’une théorie, d’une doctrine, d’une question scientifique,… » Qui d’autre qu’un poète, de langue maternelle arabe favorable à cet art de l’ellipse, peut y exceller ? Quelques exemples :

Unlike prose, poetry can keep its secrets.

The heart is patient with the mind because it knows better.

There are many ways to donate blood, writing is one.

Spiritual fast food leads to spiritual indigestion.

To write is to bow is to pray.

Généreux, il partage des lectures de poèmes d’autres auteurs, des citations de Rumi, des photos… Il est présent sur Facebook, Twitter et LinkedIn et, comme son large sourire le laisse deviner, il aime communiquer ! Alors lisez-le et dites-le lui, ça nous fera plaisir pendant que ça vous enrichira en nouvelles pistes de réflexion !