L’un de mes écrivains préférés !

Je choisis de chroniquer ce roman de 2012 que je viens de terminer, mais j’ai aimé tous ceux que j’ai lus, depuis Rouge Brésil, Prix Goncourt 2001. Une écriture fluide, un sens du suspense, de belles descriptions, Jean-Christophe Rufin nous entraîne où il veut et nous le suivons, en haleine, passionnés, accrochés.

Quel Coeur ?

Avec une majuscule, il ne peut s’agir que de Jacques Coeur, bien sûr ! Né à Bourges à l’orée du XVème siècle, fils de fourreur qui s’est d’abord lancé dans le change et la monnaie pour ensuite bâtir un empire commercial colossal, Argentier de Charles VII (le roi couronné grâce à Jeanne d’Arc), puis l’un de ses conseillers, amoureux de la belle Agnès Sorel, maîtresse du roi dont un portrait sert d’illustration à l’édition Folio du roman :

Le Grand Coeur, édition Folio
Au lieu de nous reconstituer la période à travers un récit objectif, Rufin a choisi de la raconter à la première personne : Jacques Coeur rédige ses mémoires dans l’île de Chios où des assassins l’ont suivi pour le tuer. Il pense d’abord à la jalousie de Charles VII qui l’a disgracié lorsqu’il a su que son argentier était plus riche que lui (Coeur accepte de prêter au roi une somme colossale pour l’aider à chasser définitivement les Anglais hors du royaume), mais en apprenant que ses poursuivants sont florentins, il se souvient d’un jeune homme italien qu’il a ignoré et qui lui en veut depuis. La réalité historique est ailleurs, mais on ne s’en plaint pas, car la présence de ces hommes sur l’île où Coeur s’est réfugié donne une urgence à son récit : il tient à l’achever avant de mourir. Ainsi, il nous conte son histoire avec force détails, à la fois sur les événements qu’il a vécus, mais aussi sur le roi et sa cour, sur cette période de transition entre la chevalerie médiévale où les princes gouvernent de naissance et l’émergence d’une classe politique de roturiers bourgeois, et enfin sur le contexte plus large du monde au Moyen Âge : la papauté, les royaumes indépendants dont la Provence, et le Levant après les Croisades, Jacques Coeur ayant été un pionnier qui a développé le commerce avec toute la Méditerranée jusqu’en Egypte et en Syrie, avec une clairvoyance nouvelle.

C’est haletant, attendrissant, tantôt triste et tantôt joyeux, gourmand, sensuel, inquiétant, bref, c’est la grande Histoire comme si on y était !

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